Le Pont du milieu,
Théâtre le Samovar,
165, av. Pasteur, 93 Bagnolet,
01-43-60-76-46, www.lesamovar.net
Du 28 oct. au 21 nov., du mar. au sam. 20h30, dim. 17h.
Nouvel
Observateur - 27 octobre 2004
Farid
Chopel Ressuscité
Il
revient de loin. Après dix ans derrances alcoolisées,
lacteur retrouve les planches dans un one-man-show où
il se raconte : le Pont du milieu. Même énergie
physique, même humour inclassable
Ses
lieux
Théâtre dAligre
«Jadore les marchés. Jy fais chaque semaine
les courses. Mais je connais le côté cour aussi. Jai
aidé des amis à vendre des légumes ici. Cest
une bonne scène, presque un théâtre.»
Marché Beauvau, place dAligre (12e).
Jardin
denfance
« Le square de la place des Vosges a été lun
de mes terrains de jeux. A une période de mon enfance, jhabitais
avec ma mère au-dessus dun petit café rue des
Francs-Bourgeois, à deux pas. Le Marais était vieux
et sale, il ny avait pas encore les bobos, mais la place était
superbe. Aujourdhui encore cest magnifique. Peut-être
que jy habiterai un jour. »
Place des Vosges (3e et 4e).
Tapas
entre amis
«Jaime ce petit resto tranquille où je vais avec
des amis pour grignoter ses excellentes tapas. Mais ne comptez plus
sur moi pour aller au café tout seul, je trouve ça
trop déprimant. »
Les Caves Saint-Gilles, 4, rue Saint-Gilles (3e).
Longue
silhouette souple, sourire enjôleur, Farid Chopel, assis tranquille
à la terrasse de ce café du Marais, a gardé
la même allure quon lui connaissait il y a dix ans.
Pourtant ce nest plus tout à fait le même. Il
a choisi la place des Vosges parce que si lon a envie «on
pourra continuer à discuter dans le square».
Herbe verte et bac à sable, quelque chose ne colle plus avec
limage de lacteur déjanté, le fêtard
branché, lami de Coluche, quon avait laissé
au seuil de la gloire dans les années 1980. Alors quil
était déjà reconnu pour ses spectacles et des
seconds rôles marquants au cinéma, lacteur avait
explosé en plein vol.
Happé par la vie nocturne du Paris branché de lépoque,
il se noie dans lalcool. Dix ans de galère et derrance.
Partout et nulle part à la fois. De la capitale, il ne voit
que le bout du comptoir, le fond de son verre. La ville na
plus de quartiers, elle na que les visages de ceux qui laccueillent
pour une nuit ou quelques semaines. «Je dormais chez des
anonymes, des filles. Un jour dans une piaule minable, un autre
dans un duplex chic.» Six ans sans appartement à
lui, mais pas une seule nuit sans un lit proposé avant laube.
Au gré des rencontres, il change darrondissement :
Bonne-Nouvelle, 13e, 14e. Farid a une gueule quon noublie
pas, les Parisiens le reconnaissent. Dans la rue on linterpelle
«Oh, Farid, quest-ce que tu deviens ?» Il est
rempli de reconnaissance pour tous ces gens qui lont accepté
tel quil était pendant cette période, cest-à-dire
passablement invivable. Et sans un sou en poche. Passant devant
les magasins sans y entrer. «Le plus dur nest pas
la misère matérielle mais la stérilité,
le sentiment quon naura plus jamais didées.»
Les amis du showbiz et des beaux quartiers se sont envolés.
Il na pas de ressentiment. Pas envie de dépenser de
lénergie là-dedans. Un jour, il fait la bonne
rencontre, une femme, part sallonger sur un divan, arrête
de boire. Aujourdhui, il habite rue de Montreuil. Il aime
les quartiers populaires, métissés, ceux qui lui rappellent
sa petite enfance dans le 18e ou dans le Marais. Il séloigne,
son éternel béret vissé sur la tête.
Gavroche a 50 ans. Il est vivant.